OUAHROUCH ABDELLAH: Le droit international humanitaire, quels défis face aux Conflits contemporains
OUAHROUCH ABDELLAH DOCTORANT CHERCHEUR
1.Introduction
La thématique choisie et faisant objet de cet article est le droit international humanitaire face aux défis posés par les conflits contemporains. En effet, c’est un sujet de débat d’actualité qui a soulevé beaucoup de questions de la part des chercheurs, académiques, praticiens et même politiciens. C’est un thème ayant pour objet des faits réels phares contemporains, notamment les conflits inter et intra-étatiques et aussi la dynamique juridique les couvrants, s’agissant bien entendu du droit international humanitaire qui devrait faire un sujet de réflexion et débats plus qu’avant.
Ce thème ” droit international humanitaire face aux défis posés par les conflits contemporains”, et qui a fait couler beaucoup d’encre, nécessite tout d’abord une étude terminologique pour bien cerner les concepts clés qui feront le socle de cet article de recherche. Un exercice de réflexion sur les termes moteurs va nous permettre d’étoffer et préciser le périmètre de notre analyse tout au long de cet article. Ainsi, on va essayer de mettre les concept objet de cette étude dans le contexte d’évolution du droit international contemporain.
En effet, quand les groupes politiques sont en état de conflit armé, c’est alors un état de guerre. Théoriquement, la guerre est une affaire entre deux Etats ou deux groupes armés organisés, et quand ce n’est pas le cas on dirait qu’on est devant une guerre irrégulière. De la pallice classait une guerre régulière quand elle est gouvernée par des principes stratégiques et juridiques, bien entendu le droit de la guerre. Ce dernier se compose du droit à la guerre (jus ad bellum) et le droit dans la guerre (jus in bello). De nos jours, le recours à la force entre les États est interdit par une règle de droit international (le jus ad bellum est devenu le jus contra bellum)[1]. Sur la dimension stratégique, la guerre régulière devrait satisfaire les principes de la guerre dégagés par la science militaire. Aussi, selon Carl von clausewitz « La guerre est la continuité de la politique par d’autres moyens ». Et bien évidemment, la politique peut tendre de la dimension interne d’un Etat à une politique extra-étatique et voire même internationale.
Si l’implication militaire directe de plusieurs États est aisée à établir, elle ne suffit pas à rendre compte de la réalité des conflits armés contemporains, qui défient les critères juridiques trop formels d’États et de territoire contenus dans la définition conventionnelle. En effet, certains conflits armés peuvent se déployer sur les territoires de plusieurs États sans pour autant impliquer directement leurs armées nationales.
Dès lors, le droit international Humanitaire intervient Pour normaliser les conflits armés par les moyens juridiques soumis aux règles d’honneur pour préserver le droit humain durant les conflits.
Ainsi, le DIH s’applique aux conflits armés telle que soit la partie ayant déclenché les hostilités. Les tensions et troubles à l’intérieur d’un Etat sont à l’écart de cette discipline. Cette discipline de droit intervient dans les conflits armés internationaux inter-Etats et aussi dans les conflits armés intra-Etat opposant l’armée régulière et un groupe armé ou entre deux groupes armés pour protéger les personnes qui ne font pas partie des conflits cités.
2.Par quels moyens juridiques est normalisée la guerre pour la protection de l’individu et son environnement?
La dimension juridique du concept humanitaire est en effet essentielle. Elle est aujourd’hui reconnue comme telle, l’expression du droit international humanitaire n’a d’ailleurs été officialisée que dans les années 1970, précisément lors de la conférence diplomatique de Genève réunie de 1974 à 1977, qui a amené l’adoption en 1977 de deux protocoles additionnels.
Le DIH n’est pas à confondre avec l’action humanitaire et le droit qui lui est applicable. D’ailleurs, comme le rappelle Michel Belanger, « l’action humanitaire est souvent engagée quand le respect de ce droit n’est pas assuré »[2]. La codification du DIH classique est largement réalisée. C’est un droit dont les sources sont principalement conventionnelles. Le DIH classique est constituée de deux catégories de sources : il s’agit des conventions de La Haye et des conventions de Genève. En droit international, il est de coutume de distinguer les textes en référence à la ville où ils ont été adoptés. Le droit international humanitaire n’échappe pas à cette règle. Ainsi « le droit de La Haye » désigne les textes les plus anciens de ce droit qui visent à restreindre les méthodes et moyens de combat. Le « droit de Genève » concerne les textes adoptés de 1949 à 1990 qui visent à assurer la protection des personnes durant les conflits armés. Toutefois, cette dichotomie classique est de plus en plus relativisée en raison de l’interaction profonde entre ces deux branches du droit humanitaire[3]. On utilise ainsi souvent une terminologie englobante « droit de Genève » afin de désigner ces deux branches du droit humanitaire classique.
Le droit de La Haye proprement dit est constitué ainsi de seize conventions générales, qui sont fondées sur l’idée de réglementation (plutôt que d’harmonisation) de la guerre. Les conventions du 29 juillet 1899, La première conférence internationale de La Haye sur la codification du droit de la guerre a été organisée à l’initiative du tsar de Russie Nicolas et a réuni 26 Etats. Elle a adopté trois conventions (entrées en vigueur le 4 septembre 1900) : la convention I pour le règlement pacifique des conflits internationaux ; la convention II concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre ; la convention III pour l’adaptation à la guerre maritime des principes de la convention de Genève du 22 août 1864.
Les Conventions de Genève et leurs Protocoles additionnels sont des traités internationaux qui contiennent les règles essentielles fixant des limites à la barbarie de la guerre. Ils protègent les personnes qui ne participent pas aux hostilités[4] (les civils, les membres du personnel sanitaire ou d’organisations humanitaires) ainsi que celles qui ne prennent plus part aux combats (les blessés, les malades et les naufragés, les prisonniers de guerre).
Les Conventions de Genève et leurs Protocoles additionnels sont au cœur du droit international humanitaire, régissent la conduite des conflits armés et vise à limiter leurs conséquences. S’appliquant en temps de guerre, le droit international humanitaire est une branche du droit international public qui « vise à régler les questions humanitaires découlant des conflits armés ».[5]
Les Conventions et leurs Protocoles prévoient que des mesures seront prises pour prévenir ce que l’on appelle les “infractions graves” ou y mettre un terme ; les auteurs de ces infractions doivent être punis.
3.Quel est l’apport des mesures réglementaires pour arrêter les troubles issues des conflits?
Personne ne peut nier le rôle des traités dans l’histoire des relations internationales, ce cadre juridique ayant pour raison d’être de préserver les droits humanitaires, a-t-il abouti au niveau de performance dont il a la mission, notamment la lutte contre toute atteinte à la vie et l’intégrité au moment des conflictualités?
Les instances internationales telles que le CICR “droit de Lahaye” et l’ONU “droit de New York”, Cette réflexion est d’autant plus pertinente que si la doctrine internationaliste s’est beaucoup intéressée à ce qu’on pourrait appeler le droit international humanitaire stricto sensu ou droit international humanitaire classique, très peu d’écrits ont été consacrés au « droit de New York »[6], et depuis la deuxième guerre mondiale ont mis au monde des instruments juridiques couvrant l’état de guerre à savoir le DIH, et aussi des résolutions à des situations non habituelle et non classique pour ainsi dire des situations de conflits contemporains. Ce vide juridique nous fait illusion de chevauchement entre DIH et DIDH.
Le droit international humanitaire (DIH), selon la définition proposée par Jean Pictet et adoptée par le Comité international de la Croix-Rouge, s’entend de : “L’ensemble des règles internationales d’origine conventionnelle ou coutumière, qui sont spécialement destinées à régler les problèmes humanitaires découlant directement des conflits armés, internationaux ou non internationaux et qui restreignent, pour des raisons humanitaires, le droit des parties au conflit d’utiliser les méthodes et moyens de guerre de leur choix ou protègent les personnes et les biens affectés, ou pouvant être affectés par le conflit.”[7]
C’est le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) qui a défini les caractéristiques essentielles de toute action humanitaire dans les conflits armés. En effet, selon le CICR, les actions humanitaires reposent sur quatre principes essentiels que sont l’universalité[8], l’impartialité, l’indépendance et la neutralité.
Si le concept de conflit armé international est assez aisé cerné, celui de conflit armé non international “ est une nébuleuse à la fois plus simple que le conflit armé international, car il n’y a qu’un critère celui de conflit armé, et plus complexe , car le conflit armé se fragmente en une pluralité de formes distinctes de point de vue juridique”[9].
Les conflits contemporains sont générés par les rapport de forces intra étatique et voir même international, le DIH pose les principes universels à la guerre “jus in bello” et à l’exercice de la guerre “jus ad-bellum”.
C’est à dire, limiter l’exercice de la guerre et faire appel au droit international du droit de l’homme et son adaptation aux cas de conflits et hostilités.
Désormais le terme conflit armé a supplanté celui de guerre. Ainsi le corpus juridique désignant ce droit est désormais désigné par le droit des conflits armés au détriment de celui de droit de la guerre.
Nul ne peut nier l’importance qu’apporte l’opinion public international à la sauvegarde du droit international humanitaire dans les conflits contemporains, les droits de l’homme ont toujours été un sujet de débats des militants politiques, des intellectuels, des juristes et bien entendu des Etats qui se comporte détenteurs d’une responsabilité international à l’égard du reste du monde notamment toute puissance portant atteinte aux principe humanitaire.
Dès lors, « dans ce nouvel environnement, le témoignage devient un élément essentiel de l’action. Au principe suisse qui veut que le silence favorise l’écoute et la possibilité d’intervention, les sans-frontiéristes répondent par le bruit et un recours systématique aux médias »[10].
Ceci nous appel à mettre en évidence les actions et réactions humanitaires qui risquent d’être manipuler par des intérêts stratégiques et politique des touts puissants, ainsi la résistance et souveraineté des sujets du droit international sont mise en exergue. En effet, Le DIH et depuis sa naissance comme un cadre conceptuel et opérationnel a toujours été une base référentielle à la sauvegarde du droit humanitaire des acteurs et des intérêts des sujets de la guerre classique.
4.Où on est-il dans une divergence dans l’exercice de la guerre dans les conflits contemporains?
Depuis la présentation du rapport de la CICR 1969 et l’adoption des conventions de Genève, le monde a assisté à des changements spectaculaires sur de nombreux fronts: politique, économique et social, mais la réalité et, surtout, les conséquences des conflits armés n’ont hélas pas changé. Les souffrances humaines, la mort, le défigurement, la destruction et la perte d’espoir en l’avenir continuent, comme toujours, à constituer les effets immédiats et à plus long terme de la guerre sur les sociétés et sur les individus qui les composent. Ces guerres civiles ou guerres étrangères ont pour conséquence premières et dramatiques d’être des catastrophes humanitaires[11].
Outre les conflits armés internationaux et non internationaux, le monde a été récemment confronté à une recrudescence d’actes de terrorisme transnational, qui a réouvert certains dilemmes sur la relation entre la sécurité de l’Etat et la protection de l’individu. Ce phénomène a également poussé à réexaminer la viabilité du droit international humanitaire à un point que l’on n’avait pas connu depuis les efforts en vue de compléter les Conventions de Genève par les deux Protocoles additionnels.
En effet, le DIH considère, comme cela sera présenté plus loin, que les quatre Conventions de Genève et leurs Protocoles additionnels, ainsi que l’éventail des autres traités internationaux de DIH et les normes de droit coutumier constituent une base de principes et de règles qui doivent continuer à guider la conduite des hostilités et le traitement des personnes tombées au pouvoir d’une partie à un conflit.
Les conflits contemporains et DIH tel qu’il a été conçu n’arrive pas à suivre la cadence de leurs transformation et évolution des outils et intérêt compliqués des Etat et minorité autonome ou manipulés. Ainsi, on passera brièvement en revue les conflits armés actuels et leurs conséquences humanitaires, montrant ainsi la réalité opérationnelle qui pose de nouveaux défis à L’application du DIH qui est confronté aux grandes difficultés et propose aussi des mesures de renforcement de mise en vigueur.
Notre but est de faire une étude analytique de quelques-uns des défis actuels posés au droit international humanitaire (DIH), de susciter la réflexion et le débat sur les questions identifiées et d’esquisser des perspectives d’actions pour clarifier et développer le droit dans les années à venir.
Qu’en est-il des défis d’application et de mise à en œuvre du DIH?
Cette question devrait être replacer dans un contexte historique et réitère la position des instances humanitaires selon laquelle les principaux traités et les normes coutumières du droit international humanitaire constituent une base de principes et de règles qui doivent continuer à guider la conduite des hostilités et le traitement des personnes tombées au pouvoir d’une partie à un conflit armé.
Outre les conflits armés internationaux, non internationaux et les conflits armés internes “internationalisés”[12], la situation a beaucoup évolué ces deux décennies en raison du lancement d’une lutte mondiale contre le terrorisme par suite des effroyables événements du 11 septembre 2001. Ce travail relève que la lutte contre le terrorisme a entraîné un réexamen de l’équilibre entre la sécurité des Etats et la protection des individus et que le défi juridique et moral primordial consiste à trouver des moyens de faire face à de nouvelles formes de violence tout en préservant les niveaux de protection existants prévus par le droit international.
La polarisation des forces mondiales a encore plus fortifier la résistance à l’application du DIH aux conflits contemporains. De sorte que sa mise en œuvre est remise en cause à bien des niveaux.
La mutation des conflits asymétrique et l’implication implicite ou apparente des Etats complique les défis d’application du DIH. L’impérativité d’appliquer le DIH malgré son handicap a favorisé un rapprochement du DIDH et ainsi revenir aux instances onusienne. Ces tendances ont une autre conséquence notamment la complexité croissante des interprétations juridiques, qui éloignent excessivement le droit des réalités du terrain[13].
Nul ne peut nier que le droit applicable aux conflits contemporain qui deviennent de plus en plus nombreux est médiocre par rapport aux défis qui s’imposent. La timidité des dispositions en places appelle à revenir vers d’autres mécanismes pour renforcer la prévention d’une part et la répression d’autre part. L’intervention des Nations unies dans la sphère humanitaire s’est effectuée sur le plan normatif mais également sur le plan opérationnel[14]. Telle que les résolutions humanitaires votées par les nations unis, les instances internationales non gouvernementales, la cour pénale internationale…
En effet, et comme nous le démontrerons également plus loin, certains des dilemmes auxquels s’est confrontée la communauté internationale il y a des décennies ont été, en général, résolus de manière satisfaisante par l’évolution du DIH. Aujourd’hui, le défi numéro un consiste à assurer une clarification des règles ou bien à les perfectionner.
Deuxièmement, l’opinion internationale – des gouvernements comme des experts ainsi que du grand public – reste largement divisée sur la manière de faire face à de nouvelles formes de violence, essentiellement aux actes de terrorisme transnational et la réponse humanitaire qui suit ces actes, ont subi d’importantes mutations conceptuelles et opérationnelles[15].
Les caractéristiques nouvelles ou aggravées de la violence posent d’énormes défis en termes de protection des civils. Il semble que les conflits armés soient devenus plus complexes et les accords de paix permanents plus difficiles à conclure. L’instrumentalisation des différences ethniques et religieuses semble être devenue une caractéristique permanente de nombreux conflits.
De nouveaux acteurs capables de s’engager dans la violence ont fait leur apparition. La nature fragmentée des conflits dans les États faibles ou déstructurés donne lieu à une multiplication d’acteurs armés. Le chevauchement entre les objectifs politiques et privés contribue à brouiller la distinction entre conflits armés et activités criminelles. Des techniques de plus en plus sophistiquées sont utilisées par ceux qui les possèdent pour faire la guerre. La disponibilité incontrôlée de grandes quantités et de vastes catégories d’armes a également connu une augmentation spectaculaire. Jointes à la tendance confirmée à l’instrumentalisation des activités humanitaires à des fins militaires ou politiques. Ces caractéristiques rendent le travail des organisations humanitaires particulièrement difficiles dans de tels contextes.
La complexité croissante des conflits armés a donné lieu à de nombreuses discussions sur la notion de conflit armé et les différents types de conflits armés. La question se pose notamment de savoir si les qualifications de conflit international ou de conflit non international qu’emploie le DIH sont suffisantes pour englober tous les types de conflits armés qui sévissent actuellement. Le CICR estime que cette dichotomie est suffisante, tout en reconnaissant que de plus en plus de situations peuvent être qualifiées de conflit armé extranational.
La question qui se pose dans ce sens est de s’interroger sur les critères à partir desquels l’existence d’un conflit armé international peut être établie, et s’interroge sur l’adéquation des deux seules catégories de conflits armés que définit le DIH – les conflits internationaux et les conflits non internationaux. A mettre en évidence aussi les différents types de conflits armés non internationaux régis par l’article 3 commun aux Conventions de Genève de 1949.
La portée et le nombre des traités de DIH régissant les conflits armés non internationaux sont bien plus réduits que ceux applicables aux conflits internationaux[16]. Les conflits armés internes sont couverts par l’article 3 commun aux Conventions de Genève, par le Protocole additionnel II aux Conventions adopté en 1977 (156 Etats parties à ce jour), par un certain nombre d’autres traités, ainsi que par le droit international coutumier. On le sait, le processus de rédaction qui a abouti au deuxième Protocole additionnel envisageait un instrument sensiblement plus complet, mais l’absence d’accord politique dans les derniers jours de la Conférence diplomatique de 1977 n’a pas permis une telle issue. Le Protocole additionnel II a néanmoins été novateur en ce sens qu’il a été le premier traité distinct fixant des normes pour la protection des personnes ainsi que des règles de base sur les méthodes de conduite des hostilités applicables par les États comme par les groupes armés non étatiques impliqués dans des conflits armés internes.
Les recherches et rapports des instances internationales humanitaires rappelle sur la diversité des groupes armés impliqués dans des conflits armés contemporains, qui sont de plus en plus nombreux et présentent des caractéristiques disparates, du mieux organisé au moins bien structuré. Il en découle des défis inhérents en termes humanitaires et de protection, tels que les règles applicables à la détention par des groupes armés ou les difficultés liées à la négociation humanitaire. Au nombre des défis juridiques, Ce travail va traiter trois aspects : l’applicabilité du DIH aux conflits impliquant de multiples groupes armés ; le régime juridique applicable aux personnes vivant dans des zones contrôlées par des groupes armés ; et les dilemmes pratiques et juridiques liés à la détention par des groupes armés.
L’applicabilité du DIH face à un contexte évolutif conflits armés contemporains
Le présent travail passe brièvement en revue les conflits armés actuels et leurs conséquences humanitaires, montrant ainsi la réalité opérationnelle qui pose de nouveaux défis au droit international humanitaire. Telle que les questions relatives à l’applicabilité du DIH qui font l’objet d’un débat juridique depuis plusieurs années. La première de ces questions est la façon de déterminer le début et la fin de l’applicabilité du DIH dans les conflits armés internationaux ou non internationaux – une question qui a des implications juridiques et pratiques évidentes.
Aussi, la couverture géographique du DIH s’impose comme défi, plus particulièrement pour ce qui est de l’emploi extraterritorial de la force contre des individus. La relation entre le DIH et le régime juridique applicable aux actes de terrorisme est également abordée, notamment pour réaffirmer qu’il est nécessaire de faire une distinction entre les deux et pour rappeler les aspects du DIH relatifs au phénomène des « combattants étrangers ».
On peut aussi présenter au débat diverses questions juridiques touchant aux activités humanitaires afin d’analyser certains points faisant l’objet d’un vif débat au regard du DIH. Cette deuxième section est consacrée aussi à la protection spécifique du personnel et des biens et zones neutralisées[17]. Elle met plus particulièrement l’accent sur l’application, aux personnels et biens sanitaires militaires, des principes de proportionnalité et de précaution dans l’attaque relevant du DIH, ainsi que sur la portée de la notion « acte nuisible à l’ennemi » dans le contexte de la protection spécifique conférée aux personnels de santé, aux structures médicales et aux moyens de transport sanitaire. Dans de nombreux conflits armés contemporains, il est de plus en plus attendu des forces armées qu’elles conduisent non seulement des opérations de combat contre les forces adverses, mais aussi des opérations de maintien de l’ordre pour garantir ou restaurer la sécurité et l’ordre publics.
L’interaction entre le paradigme de la conduite des hostilités et celui du maintien de l’ordre dans les situations de conflit armé. Plusieurs scénarios factuels quoique hypothétiques servent de contexte pour la délimitation et l’application de ces deux cadres juridiques ainsi que le recensement des défis juridiques et pratiques qui en découlent.
Il faut aussi attirer essentiellement l’attention sur les activités du CICR dans le domaine de la détention, c’est-à-dire le processus de consultation entrepris avec les États. [18]
Compte tenu de l’accroissement des combats en zone urbaine, les parties au conflit sont confrontées à des défis spécifiques. On va se pencher au moins sur trois d’entre eux. Le premier défi fondamental consiste à faire en sorte que les principes essentiels du DIH régissant la conduite des hostilités – distinction, proportionnalité et précaution – soient appliqués de manière à protéger les civils sur les champs de bataille urbains, qui sont caractérisés par l’entremêlement de civils et de combattants, la proximité de biens civils et d’objectifs militaires, ainsi qu’un réseau complexe d’infrastructures urbaines interconnectées.
Aussi faut-il mettre en évidence également de la nécessité de veiller à ce que les situations de siège et les tactiques d’encerclement n’enfreignent pas les règles relatives à la protection de la population civile, une question qui a suscité un intérêt croissant lors de récents conflits.
Aujourd’hui, le caractère prolongé de nombreux conflits armés a un impact sur les besoins et les vulnérabilités des populations civiles. Ce chapitre présente une sélection de questions liées au DIH qui se rapportent au débat humanitaire plus vaste sur la protection des populations civiles. En particulier, ce chapitre expliquera comment le respect du DIH peut permettre de trouver des solutions durables pour porter assistance aux nombres exceptionnellement élevés de personnes déplacées à l’intérieur de leur pays.
En ce qui concerne l’applicabilité du DIH aux conflits impliquant de multiples groupes armés, le CICR souligne d’abord les difficultés liées à l’application du DIH aux « alliances » ou aux « coalitions » que forment certains groupes armés entre eux. En effet, dans ces contextes, l’évaluation des critères d’intensité et d’organisation peut s’avérer complexe. Le CICR est d’avis que dans de telles situations, l’examen de l’intensité de la violence doit se faire collectivement « en considérant la somme des actions militaires entreprises par tous [les groupes] se battant ensemble ». Par ailleurs, lorsque des groupes viennent s’ajouter à un conflit armé non international préexistant, le CICR estime que « la nature du soutien militaire apporté par le groupe supplémentaire jouera un rôle clé afin de déterminer si ce groupe se qualifie de partie à ce conflit armé ».
Le CICR considère qu’il faut procéder à une évaluation séparée pour chaque groupe et distingue entre les cas dans lesquels les combats dans lesquels s’engage un nouveau groupe sont entièrement séparés des hostilités précédentes et ceux dans lesquels le nouveau groupe armé continue à se battre aux côtés du groupe auquel ses membres appartenaient jusqu’alors.
Le CICR évoque enfin les cas dans lesquels un groupe initialement engagé dans les hostilités s’en désengage, alors que le nouveau groupe armé continue d’y participer, les questions non résolues étant dans cette hypothèse les plus nombreuses. À cet égard, le CICR encourage la poursuite de la réflexion à ce sujet.
En ce qui concerne le régime juridique applicable aux personnes vivant dans des zones contrôlées par des groupes armés, le CICR rappelle qu’il n’existe pas de droit relatif à l’occupation dans les conflits armés non internationaux, et qu’il n’existe par conséquent pas de règles explicites qui règlementeraient les relations entre les groupes armés et les personnes vivant sous leur contrôle.
Dès lors, « le débat actuel que l’on voit poindre dans le monde humanitaire pour savoir comment rétablir l’équilibre entre l’assistance qui arrive dans les zones contrôlées par le gouvernement et celle qui reste toujours attendue dans les zones contrôlées par les groupes opposants est nécessaire[19] ».
Cela ne doit toutefois pas laisser penser qu’il n’existerait aucune restriction. Le DIH comporte des règles humanitaires essentielles protégeant les civils dans ces situations. Le CICR rappelle sa position, déjà exprimée en 2015 dans son rapport, selon laquelle dans les situations de conflits prolongés le DIH continue de s’appliquer jusqu’à ce que les hostilités cessent et qu’il n’y ait plus de risque de résurgence de la violence, « ce qui est rarement le cas lorsque le contrôle du territoire continue de faire l’objet de contestation entre les belligérants ». Aussi, durant tout ce temps, la population civile reste sous l’empire des protections fondamentales offertes par le DIH.
5.La couverture juridique du droit humanitaire aux conflits armés non étatiques
- Groupes armés et droits de l’homme
Le CICR aborde également le débat relatif à l’applicabilité du droit international des droits humains aux groupes armés. Il constate que ce corpus contient un certain nombre de droits, en particulier économiques sociaux et culturels, plus élaborés que les protections offertes par le DIH. Si la question de savoir si ce droit lie les groupes armés reste controversée, on relève toutefois un certain nombre d’occurrences dans lesquelles les États ont appelé les groupes armés contrôlant des territoires à respecter le droit international des droits humains en plus du DIH (principalement par le biais d’organes des Nations Unies).
D’un point de vue pratique toutefois, il faut conserver à l’esprit que les groupes armés ne sont parfois pas en mesure de mettre en œuvre des obligations sophistiquées découlant du droit international des droits humains. Il en résulte que le CICR adopte une approche pragmatique reposant « sur la prémisse que les responsabilités en matière de droits humains peuvent être reconnues de facto’ » lorsqu’un groupe armé exerce un contrôle stable sur un territoire donné et se comporte à l’image d’une autorité étatique.
- Groupes armés et détention
Enfin, en ce qui concerne la détention par les groupes armés, le CICR constate que dans les pays dans lesquels il assure une présence, plus de 80 d’entre eux détiennent des personnes, et ce pour des raisons multiples (ennemis, personnes ayant commis des infractions de droit commun, otages, etc.). L’article 3 commun ne dit rien de la détention. Le Protocole additionnel II en revanche, tout comme le droit international humanitaire coutumier, exige que les parties au conflit respectent un certain nombre de garanties liées au traitement et aux procédures dont font l’objet les personnes détenues en relation avec le conflit[20].
Il n’en demeure pas moins qu’un grand nombre de défis juridiques restent non résolus à ce jour. Le CICR en dresse une liste : connaissance et acceptation des règles par les groupes armés, ressources matérielles disponibles afin d’être en mesure de mettre ces règles en œuvre, procès équitable, garanties procédurales en matière d’internement, non refoulement etc. De ces défis, il résulte des besoins humanitaires significatifs.
Le chapitre suivant mettra en évidence certains défis cité ci-dessus tout en explicitant l’application et l’applicabilité du DIH face à ces défis dans les conflits contemporains.
6.Les restrictions institutionnelles et politiques à l’application du DIH
Un des enjeux majeurs qui se posait alors à l’Organisation des Nations unies était de savoir comment concilier la nécessité de mesures efficaces sur le plan international avec le principe de la souveraineté des états. Toutefois, ces protocoles furent adoptés dans des conditions laborieuses dans la mesure où ces dispositions nouvelles du DIH vont se heurter à la méfiance des États soucieux de préserver leur souveraineté. Ainsi, par souci de compromis, certaines dispositions pertinentes relatives au champ d’application des conflits non internationaux, aux méthodes et moyens de guerre ont été soit abandonnées soit adoptées sous une forme moins contraignante. Malheureusement, « le dicton selon lequel le droit a toujours une guerre de retard »[21] va à nouveau se réaliser et cette fois il va marquer durablement les esprits dans la mesure où il amorce l’ère contemporaine de l’action humanitaire. C’est là son aptitude à mettre le monde en question.
- Le fléau de l’impunité
Ce phénomène existe dès que la justice n’est pas rendue quand des droits sont bafoués. Le cercle est vicieux : l’impunité nourrit l’injustice qui entretien la spirale de violences dans un cycle infernal. Lutter contre l’impunité en toutes circonstances est donc impératif pour bâtir un monde de justice et de respects des droits.
- Le renforcement des mécanismes de la justice :
Quand les systèmes judiciaires nationaux sont défaillants ou inexistants, la justice internationale est un relais. Cette justice est encore récente et imparfaite. Mais elle est l’ultime rempart contre l’impunité et travailler à la renforcer est une priorité. La Cour pénale internationale (CPI) en place depuis 2002 est le mécanisme international ultime pour faire respecter l’obligation de répondre de ses actes, et rendre justice aux victimes pour les crimes les plus graves. Des juridictions pénales internationales spéciales mises en place par les Nations unies pour juger de crimes de génocides ou crimes de guerre commis au Cambodge, au Rwanda ou encore en ex-Yougoslavie et bientôt en République centrafricaine complètent ce dispositif qui vise à ce que les crimes les plus graves ne restent pas impunis.
7.La responsabilité internationale, ingérence et légitimation de la violence
Peut-on pour autant affirmer que la prépondérance des questions humanitaires au sein de la société internationale semble être le signe d’un changement majeur du droit international en le faisant passer d’un droit international public ou droit inter-étatique à un véritable droit des gens selon l’expression du professeur George Scelle?[22]
L’ingérence pour des motifs humanitaires ne date pas d’aujourd’hui. Cette notion remonte aux origines les plus primitives du droit des gens. La question fondamentale que se posait le monde chrétien était celle de la nature des causes qui pouvaient fonder une ingérence ou une guerre. Si les causes étaient justes au regard de la tradition théologique, il y avait droit de “juste guerre”. Au XIX e et au début du XXe siècles, les Etats et la doctrine occidentale adaptent ce “droit” à la guerre “juste”, en légitimant l’expansion coloniale par la théorie de “l’intervention d’humanité”. La consécration du principe d’égalité souveraine des Etats dans la charte des Nations-Unies au lendemain de la deuxième guerre mondiale a pour conséquence l’interdiction de l’ingérence sous toutes ses formes. Aucun Etat, quel que soit sa puissance, ne peut imposer sa volonté à un plus petit que soi. L’ingérence donc, même au nom de l’humanitaire, est interdite en droit international contemporain.
Eu égard à ces différents témoignages, il est clairement établi que « l’intervention des militaires dans la sphère « humanitaire » sert le plus souvent à faire la promotion d’intérêts politiques et la prolongation de la politique étrangère sous d’autres formes. Or, par essence, l’action humanitaire ne peut être la poursuite de l’action politique par d’autres moyens. Elle ne doit ni se substituer, ni être intégrée au politique[23] ».
Le revers de la médaille du droit d’ingérence, est dans le cas où il passe à côté de la mission de préservation du droit international humanitaire. Autrement dit, quand les intérêts des Etats protectrice sont manipulés au détriment de leur noble mission. Les rebelles en Irak et Afghanistan ne sont pas loin d’être des cas expressif d’une manifestation contre la communauté internationale.
8.Face à ces défis, comment peut-on revitaliser l’action humanitaire?
La mise en œuvre du DIH nécessite de veiller sur l’exécution des normes en vigueur avec plus de répression à toute transgression de ce droit. Ceci n’aboutira qu’avec l’implication responsable des états par l’actualisation de leur droit interne et assurer la reddition des comptes à l’égard de toute violation dont il peut faire objet.
Dans le même ordre d’idée, la responsabilité internationale n’est pas mise à l’écart et la communauté internationale devrait mobiliser ses instances institutionnelles et non gouvernementales pour une mise en œuvre effective des instructions du DIH, son développement et son adaptation aux nécessités de l’heure. La priorité est de faire appliquer le droit international humanitaire pour que les civils soient épargnés et protégés dans les situations de conflits. Cela passe par :
- L’interdiction et la condamnation de crimes de guerre tels que l’attaque délibérée contre des civils ou des biens de caractère civil, la disparition forcée, la torture, les exécutions sommaires, et de possibles crimes contre l’humanité.
- La mise en œuvre du Traité international sur le commerce des armes (TCA) via la modification des législations nationales et leur application.
- La protection des femmes et des enfants contre les violences dans les conflits notamment via l’application de résolution 1325 des Nations unies, qui impose aux Etats de prendre les mesures nécessaires.
- La fin du recrutement et de l’utilisation des enfants soldats : leur démobilisation, leur réadaptation et leur réinsertion dans la société
- L’accès des victimes au droit et à la justice internationale
- La fin de l’impunité pour les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité…
Une réflexion universelle de la communauté internationale est recommandée d’urgence sur tous les mécanismes institutionnels, juridiques, politiques et médiatiques…pour favoriser une application effective du DIH.
Améliorer le respect du DIH reste en permanence une question prioritaire pour le CICR et la communauté internationale. Sa raison d’être et son but est de susciter des réflexions fécondes et des propositions sur les manières de mettre en œuvre l’article 1 commun aux quatre Conventions de Genève qui stipule que les Etats ont le devoir de “respecter et de faire respecter[24]” leurs dispositions “en toutes circonstances”.
Enfin, les mesures du renforcement du respect du DIH, ce que le CICR considère depuis longtemps comme le défi le plus important du DIH, sont présentée dans les travaux récemment réalisés ou lancés par le CICR et ses partenaires afin d’améliorer leur dialogue avec toutes les parties à un conflit armé.
Renforcer le respect du DIH par le rôle des sanctions est une initiative prise par le CICR pour étudier le rôle des sanctions et leur effet dissuasif sur les auteurs de violations graves du DIH, la nature et les caractéristiques de ces sanctions, ainsi que le contexte dans lequel elles sont appliquées.
Le CICR souligne le fait que l’un des plus grands défis dans les conflits armés contemporains réside dans le non-respect du DIH. Concernant la question du respect du DIH, le rapport a dégagé quatre thèmes principaux que sont : les enquêtes pendant les conflits armés, contenir la violence dans la guerre, les « relations de soutien » dans les conflits armés et le respect du droit sur le champ de bataille.
Concernant les enquêtes pendant les conflits armés, elles représentent un moyen pour les parties au conflit d’améliorer le respect du DIH en ce qu’elles peuvent servir à démontrer qu’un État a violé le DIH, ou a contrario qu’il met tout en œuvre pour éviter et corriger les éventuelles violations.
Le CICR s’est également basé sur The Roots of Restraint in war, une étude de juin 2018 qui a identifié quatre points principaux afin d’analyser la manière dont les normes permettant de contenir la violence dans la guerre peuvent être intégrées dans les différents types de forces armées et de groupes armés.
Premièrement, cette étude a démontré que plus les niveaux de formations en DIH étaient élevés, plus ces normes étaient adoptées par les combattants (étude menée sur deux armées étatiques : Les Philippines et l’armée Australienne).
Deuxièmement, les règles informelles ont un impact fort sur la conduite des forces armées, même dans le cas de hiérarchies militaires strictes, et peuvent même remettre en cause des règles issues d’instructions formelles.
Troisièmement, le fait de ne se focaliser que sur le droit a beaucoup moins d’effet que la combinaison du droit avec les valeurs qui l’entourent.
Enfin, les entités externes peuvent influencer aussi bien les forces armées que les groupes armés non étatiques.
S’agissant des « relations de soutien » dans les conflits armés, le CICR rappelle que respecter le DIH inclut également l’obligation de ne pas encourager ni aider les violations du DIH, ainsi que d’inciter activement les parties au conflit à respecter le DIH. Il s’agit d’une obligation de moyen qui incombe aux États amenés à apporter leur soutien à l’une ou l’autre des parties au conflit.
Cela inclut l’initiative Support Relationships in Armed Conflict du CICR, qui vise à exploiter les réseaux complexes des relations de soutien et de partenariat dans des conflits armés contemporains afin de renforcer le respect du DIH, l’étude du CICR, Contenir la violence dans la guerre : les sources d’influence chez le combattant, qui identifie les sources qui influencent les normes de comportement dans les forces armées et les groupes armés ; ainsi que l’élaboration des Guidelines on Investigating Violations of IHL : Law, Policy, and Good Practice.
Finalement, pour le DIH en action, c’est-à-dire sur les champs de bataille, le CICR revient sur l’impression générale que le DIH est plus souvent violé que respecté. Cette impression est notamment entretenue par la médiatisation des violations du DIH et a pour effet de susciter un questionnement sur l’impact du DIH et son effectivité. Or, cette médiatisation, et le doute qu’elle suscite, risquent de banaliser les violations du DIH, qui apparaissent comme récurrentes et donc plus acceptables. C’est pourquoi il faut encourager la mise en avant d’exemples de respect du DIH qui sont trop souvent oubliés au profit des violations.
9. Conclusion
Bref, les expériences ont montré que le DIH est un cadre formel dont l’application dépend d’autres paramètres extérieurs à cette discipline, notamment la volonté politique des communautés et instances internationales.
Les Etats puissant ou protectrice ou même civilisés comme on les a appelés devrait assumer leurs responsabilités ou au moins rester indépendants…
L’acteur principal du DIH humanitaire s’agissant même des conflits interne est l’Etat. Les restrictions aux dispositions humanitaires fait défaut à son application. Cet échec de l’application du DIH est devenu un substitut de l’application de la diplomatie occidentale et pour remédier à ces lacunes, une ingérence humanitaire démocratique devrait être mise en place.
L’attitude qui règne aujourd’hui en survolant les conflits contemporains est que le cadre humanitaire ne sert que de couverture tandis que c’est les enjeux politiques prennent place. Ceci apparaît clairement dans les interventions des Etats secouriste, et ainsi les relations Nord-Sud sont mises en exergue.
La charte des NU qui prévient les atteintes à la paix et l’usage de la force militaire est une médaille à deux revers. Son application positive dans l’ingérence humanitaire dépend de la conscience et la bonne fois de la communauté internationale.
L’usage des médias et tous moyens de communication détenu par les plus fort reste un paramètre affectant directement les attitudes de la communauté internationale. Cette manipulation qui sert aux intérêts stratégiques de certains acteurs fait déjà un faux départ pour application d’une justice internationale.
Peut-on alors détacher les intérêts stratégique et politique d’un Etat, qui sont sa raison d’être, de sa responsabilité morale ?
Certains analystes renvoient à la configuration internationale de l’après-guerre comme cause à ce paralysé du DIH.
En fait, l’objectif de notre travail est de réveiller les consciences de l’humanité par des écrits, sensibiliser toute la communauté internationale à prendre une part importante à la répression de ces atrocités afin d’éradiquer la criminalité et l’impunité de ceux qui violent les droits humains fondamentaux, en vue de restituer toute sa dignité à l’être humain. Et cela ne peut être possible que par la coopération des tous les Etats du monde, qui doivent se sentir concernés par cette bataille.
Finalement, c’est la dimension émotionnelle qui a été la motivation pour mettre en place le DIH. Et c’est cette dimension qui est toujours à l’origine de son infraction. En effet, et de la même façon, ce n’est que la volonté émotionnelle de la communauté internationale qui stimulerait une relance du DIH. Cette volonté de masse a toujours apparu après les grandes souffrances de l’humanité. Espérant que la souffrance s’arrête là, sinon c’est l’histoire qui se répète…
En guise de conclusion, Ce travail réitère que même la guerre a des limites, et qu’ancré dans l’expérience des États, le DIH permet « un équilibre prudent et pragmatique » entre les nécessités militaires et l’humanité. Il réaffirme également que l’on doit toujours en revenir aux basiques et que toute interprétation ou développement du DIH devrait s’inscrire dans les protections qu’il prévoit et ne jamais les affaiblir.
(*) Cet article est accepté par le comité scientifique du Centre maroc du droit pour les études et les recherches juridiques
[1] Comme exprimé dans la Charte des Nations Unies, 26 juin 1945, Chapitre I, Art. 2(4) : « Les Membres de l’Organisation s’abstiennent dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l’emploi de la force, soit contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies ».
[2] BELANGER M., Droit international humanitaire, 2 e édition, Paris, Gualino, 2007, p. 15.
[3] La CIJ dans son avis consultatif du 8 juillet 1996 relatif à la licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires affirmait à ce propos que « ces deux branches du droit applicable dans les conflits armés ont développé des rapports si étroits qu’elles sont regardées comme ayant fondé graduellement un seul système complexe » Cf. CIJ, L’illicéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, avis consultatif, 8 juillet 1996. Rec. 1996, p. 34. Toutefois, les Protocoles additionnels de 1977 avaient déjà opéré un rapprochement entre le droit de Genève et le droit de La Haye.
[4] Principes et bonnes pratiques pour l’aide humanitaire, disponible sur : http://www.goodhumanitariandonorship.org/Libraries/Ireland_Doc_Manager/FR-23-Principles-and-Go od-Practice-of-Humanitarian-Donorship.sflb.ashx.
[5] BUIRETTE P., LAGRANGE P., Le droit international humanitaire, Paris, La découverte, 2008, p. 4.
[6] Voir notamment BETTATI M., Droit humanitaire, Paris, Dalloz, 2012, 321 p.
[7] PICTET J., « Le droit international humanitaire : définition », in Les dimensions internationales du droit humanitaire, Paris, Pedone, 1986, p. 13.
[8] Voir PASQUIER A., « Action humanitaire, une légitimité en question ? », RICR, juin 2001, vol. 83, n° 842 p. 314-316.
[9] KOLB (R), Jus in bello : le droit international des conflits armés, Op. Cit., p. 168.
[10] ANDLAU G., op. cit., L’action humanitaire, p. 50.
[11] LEBEN C., « Vers un droit international des catastrophes ? », in CARON D., LEBEN C., Les aspects internationaux des catastrophes naturelles et industrielles, 2001, op. cit., p. 45.
[12] Pour plus de détails, voir notamment l’article de Remigiusz BIERZANEK, «Quelques remarques sur l’applicabilité du DIH des conflits armés aux conflits internes internationalisés», Études et essais sur le DIH et les principes de la Croix-Rouge, op. cit., pp. 282-290.
[13] MELZER (N), Droit International Humanitaire, introduction détaillée, CICR, 2018, p. 12.
[14] BUIRETTE P., LAGRANGE P., Le droit international humanitaire, op. cit., p. 8.
[15] AUDET F., « L’acteur humanitaire en crise existentielle, les défis du nouvel espace humanitaire », Études internationales, Décembre 2011, vol. 42, numéro 4, p. 447.
[16] RICR Mars IRRC March 2004 Vol. 86 No 853 261 262 Faits et documents Reports and documents armés internationaux
[17] Les zones neutralisées désignent des espaces établis à proximité du front, par accord entre parties au conflit, afin de mettre à l’abri des combats, les blessés, les malades, les civils et les militaires ainsi que l’ensemble de la population. Elles sont de caractère provisoire tactiquement, c’est pourquoi il faut bien les distinguer des zones sanitaires et de sécurité. Cf. article 15, IVe convention.
[18] Fait l’objet de l’un des deux autres rapports sur les questions touchant au DIH qui sont présentés à la 32IC/15/11 5 XXXIIe Conférence internationale pour examen et décision (Rapport sur le renforcement du droit international protégeant les personnes privées de liberté).
[19] BRIGAUD T. et SALIGNON P., « Respecter l’espace humanitaire », Humanitaire [En ligne], 34 | 2013, mis en ligne le 22 avril 2013, sur : URL : http://humanitaire.revues.org/1810.
[20] Art. 143 CG4. Art. 59 CG4. Art. 61 CG4. Art. 123 CG3. Art. 140 CG4. Art. 123 CG3..
[21] BOUCHET-SAULNIER F, « Cent cinquante ans de réalisations normatives », Questions internationales, Juillet-Août 2012, op. cit., p. 28.
[22] Selon ce dernier, « l’expression droit interétatique serait pourtant, du point de vue traditionnel, beaucoup meilleure, puisque la doctrine classique a longtemps considéré les États comme « des personnes juridiques », et les principales, sinon les seules, de la société humaine. C’est une conception que nous combattrons. Pour nous, les rapports qu’il va s’agir de décrire et d’analyser sont des rapports entre individus, formant une société universelle, et appartenant en même temps à d’autres et innombrables sociétés politiques […] Le terme « Droit des gens » dans son acception la plus large nous paraît le mieux approprié ». Cf. SCELLE G., Précis du droit des gens, Paris, Éditions du CNRS, réédité en 1984, Préface p. ix.
[23] FORSTER J., « Raison d’État et Raison humanitaire » in Dérives humanitaires, États d’urgence et droit d’ingérence, PERROT M.-D. (dir.), Paris, PUF, 1994, p. 75.
[24] Pour plus de détails, voir l’article de L. CONDORELLI et de L. BOISSON de CHAZOURNES: «Quelques remarques à propos de l’obligation de respecter et faire respecter le DIH en toutes circonstances» paru dans Études et Essais sur le DIH et sur les principes de la CroixRouge, Genève-La Haye, Martinus Nijhoff Publishers, pp. 18-34.